2017-02- Etude INRA- Réduire l’usage des pesticides en agriculture sans perte de performances

Dans le cadre du réseau DEPHY-Ferme, action majeure du plan gouvernemental Ecophyto visant à réduire et améliorer l’usage des produits phytosanitaires, les chercheurs de l’INRA, en collaboration avec l’entreprise Agrosolutions, ont étudié la relation entre le niveau d’usage de pesticides et les performances des systèmes de culture1 en termes de productivité et de rentabilité. Les résultats, publiés dans Nature Plants le 27 février 2017, montrent qu’une réduction significative de l’usage de pesticides est possible sans dégrader, à l’échelle de l’exploitation agricole, les performances productive et économique, à condition d’adaptations conséquentes des pratiques agricoles. La mise en œuvre de nouvelles pratiques n’est pas nécessairement facile et requiert un accompagnement des agriculteurs.


Les résultats sont issus d’un travail d’analyse de la diversité et des performances des systèmes de culture du réseau DEPHY-Ferme. Les données concernent 946 fermes de grandes cultures conventionnelles montrant des niveaux contrastés d’usage de pesticides et couvrant une diversité de pratiques agricoles françaises. Les chercheurs de l’Inra ont étudié la relation entre le niveau d’usage de pesticides et la productivité d’une part (exprimée en MJ/ha/an), la rentabilité d’autre part (estimée par la marge ‘semi-nette’, exprimée en €/ha/an).
Le premier résultat, réduire l’usage des pesticides est possible sans perte de performances

Les analyses montrent que la relation entre la Fréquence de Traitements phytosanitaires (IFT2) et les productivité/rentabilité dépend de la situation de production, i.e. du type de sol, du climat, de l’association à l’élevage qui facilite la diversification par des cultures fourragères rustiques, de l’accès à l’irrigation, ou de l’accès aux débouchés pour des cultures industrielles. En tenant compte de ces éléments de contexte, il serait possible de diminuer l’IFT en maintenant une productivité équivalente ou meilleure dans 94% des situations, et en maintenant une rentabilité équivalente ou meilleure dans 78% des situations. Cependant cette diminution d’IFT n’entraîne pas de gain de performance économique dans 89% des situations.
La réduction de l’usage des pesticides à l’échelle nationale française pourrait atteindre 30%

Par ailleurs, les chercheurs de l’Inra décrivent un scénario de transition ‘ECOPHYTO’ généralisé, selon lequel chaque agriculteur DEPHY adopterait les pratiques de l’agriculteur DEPHY qui travaille dans le même type de contexte, mais avec un IFT plus faible et une rentabilité au-moins équivalente (pour que la transition soit acceptable économiquement). Selon ce scénario, la baisse d’IFT moyenne des fermes qui changeraient de système de culture serait de 42%, sans baisse ni gain de rentabilité, soit une baisse moyenne extrapolée à l’échelle du territoire national de 30%, compte tenu des fermes qui ne pourraient changer leur système sans perdre en rentabilité. Selon ce scénario, les fermes qui changeraient de pratiques baisseraient en moyenne l’usage d’herbicides de 37%, l’usage de fongicides de 47%, et l’usage d’insecticides de 60%.

Ces résultats montrent que la réduction de l’usage des pesticides sans perte de performances est possible du point de vue technique et économique, à condition d’adaptations conséquentes des systèmes de culture, comme par exemple la diversification des cultures, avec introduction de cultures rustiques ou de prairies temporaires en régions d’élevage, la diversification des variétés, l’ajustement des dates de semis et des modalités de fertilisation associées à la modération des objectifs de rendement sur certaines cultures, l’utilisation des techniques de faux-semis et de désherbage mécanique. Or, la mise en œuvre de ces adaptations n’est pas nécessairement facile et requiert un accompagnement des agriculteurs, par le conseil, l’organisation des filières, la couverture de l’augmentation de l’exposition au risque, etc. De plus ces modifications conséquentes ne générant pas de gain économique pour l’agriculteur dans 89% des situations des mesures d’incitation économique semblent également indispensables (Paiements pour Services Environnementaux par exemple).


Pour davantage d’informations sur ce sujet :
 information Alim’agri
 lien vers la thèse de Martin Lechenet



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